Nur - Arnaud Rykner

Publié le par Cath

  Résumé des éditions Babel :
 
Dans une ville d'Orient qui le saisit et l'entraîne bien au-delà de l'exotisme galvaudé qu'il redoutait, un homme rencontre une femme, et l'amour qui les surprend alors menace de tout emporter. Secrètement, il l'appelle Nur, qui en allemand signifie "seulement" et se prononce Nour - un nom qui veut dire "lumière" en arabe. Seulement elle, seulement eux, seulement leurs corps et si peu de mots, seulement quelques jours, seulement ça. Seulement l'éblouissement d'une rencontre, un embrasement, un avenir bouleversé. Dans une chambre, au cœur d'une ville ravagée par la guerre, ils vivent intensément chaque instant de leur amour impossible, éphémère, absolu. Avec ce texte à la poésie déchirante, Arnaud Rykner fait entendre une voix sensuelle, vibrante et pure pour dire la mystique alchimie de la passion et l'urgence de s'y abandonner. 
 

Extraits :

"Dans cette salle, ouverte sous tes pas, elle se met à nue. Tu la regardes d'abord, longuement, et elle, debout devant toi, ne bouge pas. Tu ne dis rien, et elle ne dit rien à celui qui la regarde. Tu la sens qui te désire, et qui pourtant résiste doucement à ce désir qui voudrait la submerger d'un coup mais qu'elle concentre dans ton regard. Elle est tout entière dans ton regard, dans ton regard sur son corps que tu ne veux pas encore toucher, seulement regarder, seulement aimer de loin.

Puis, tu la touches.

C'est d'abord ta main sur sa peau, aussi longuement que ton regard, posée sur sa peau sans bouger, Puis ta main la quitte, un instant suspendu, dans l'air entre vous deux."

 

 

"Et moi je sais que je suis à jamais prisonnière de ton corps ; je sais qu'à présent je garde ton corps à moi pour toujours , et que je suis à lui, que je ne m'en déferai pas. Jamais. Même après ton départ. Car tu partiras, je le sais, tu le sais. Tu partiras. C'est la seule chose que nous savons pouvoir vivre ensemble à jamais."

 

 

"Elle crie que c'en est pas croyable. Elle crie tant que tu en ris, incrédule. Avant même que tu ne la touches, tu la sentais prête à crier de joie et de jouissance, mais à présent elle n'en peut plus de crier. Tu lui dis de ne pas le faire, de ne pas crier, que ce n'est pas nécessaire, comme une femme vendue qui paie en cris l'argent qu'on lui a donné. Mais ce n'est pas ça. Ses cris à elle n'ont rien à voir, avec ceux de ces femmes. Aussi incroyables qu'ils te paraissent, ses cris à elle ne mentent pas. Ils disent simplement la jouissance, la jouissance si grande qu'on voudrait en mourir, la jouissance toute simple."

 

"Tu lui dis en riant qu'elle te fait tant jouir par sa propre jouissance que tu la croirais presque envoyée pour ça, la jouissance, et pour obtenir de toi on ne sait quel secret."

 

"C'est ici que tu resteras, même si ton corps continuera d'aller."

 

 

Ce que ça m'inspire :

 

L'histoire en elle-même peut paraître un peu cliché : un homme, une femme, une ville exotique. On connaît...Mais pour une fois, le résumé est très vrai et très ressemblant.

Ce que j'ai trouvé et aimé dans ce livre et que je n'ai lu nulle part ailleurs, c'est la force du désir. Cette rencontre est un appel de peau à peau, de sexe à sexe mais sans jamais rien de vulgaire. Un peu comme un appel irrépressible contre lequel aucun des deux ne peut lutter.

 

Et c'est ce désir qui transcende une banale histoire de sexe en quelque chose de tellement plus fort, de "vibratoire". Qui sait pourquoi deux êtres qui ne se connaissent pas, peuvent s'attirer physiquement autant, en un regard, en un geste, comme une certitude que leurs deux corps vont se correspondre et se répondre dans la jouissance, comme si, bien avant eux-mêmes, bien avant de le savoir, 'ils étaient déjà prédestinés à se toucher et à s'émouvoir dans une osmose indéfinissable tant qu'on ne l'a pas vécu.

Et puis cette sensation d'avoir basculé dans autre chose, de plus loin, de plus fort, de plus fou par le ressenti, le vécu. Comment expliquer que tout à coup, les limites explosent. Les corps des deux amants ne deviennent que sensations, vibrations, ressentis ; deux corps mais une seule et même énergie qui emporte tout.

 

A partir de là, les amants savent qu'aucun retour en arrière n'est possible, que cet instant restera gravé à jamais dans leurs corps, sur leurs peaux, dans leurs âmes. Rien n'est plus comme avant, comme un césure dans leurs vies. Il y avait un avant, il y aura un après.

Le temps s'arrête là. Le reste du monde n'existe plus et pourtant aucun aveuglement : rien n'est occulté mais juste mis de côté.

Et la mort peut venir, peu importe ; toute leur vie ne tient qu'à cet instant : ils sont nés pour vivre cette "épiphanie" éblouissante qui efface tout doute, toute peine, tout ego, toute individualité. Et le lien se fait. Et le lien est là. Aucune possibilité de le remettre en question. Comme une évidence. Il n'y a rien de volontaire, rien de décidé à tout cela. Il s'agit juste d'un moment vécu qui donne une couleur plus intense à la vie.

 

Toucher un corps, même pour les amants qui refusent de se le formuler, c'est plus que se toucher physiquement, tellement plus ! ! Nier cela, c'est se leurrer et passer à côté de l'essentiel !

 

Publié dans Livres

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article